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dans une famille distinguée… ou bien, au moins, faites en sorte que vous puissiez aimer sérieusement la femme qui vous enrichira : l’amour purifie tout, l’amour ennoblit tout !

HENRI.

Vous voulez que j’aime, je le voudrais aussi ! Cette jeune fille est charmante, disent-ils !… Oui, c’est possible, je n’en sais rien. Je le croyais ! Je m’imaginais pouvoir m’éprendre un peu de ses dix-sept ans, de son caquet, de sa parure… Mais je ne peux pas la regarder, je ne la vois pas, je ne l’entends pas !… (Il se lève.) Elle passe devant mes yeux comme un fantôme, comme un chiffre ! Ah !… faites que je vous oublie, Françoise, avant de me dire d’en aimer une autre !

FRANÇOISE.

Ne parlons plus de moi, Henri !

HENRI.

Oh ! si, ma sœur ! parlons de toi, envers qui j’ai été si coupable… de toi, à qui j’ai fait tant de mal !

FRANÇOISE.

Je n’en sais rien, j’ai oublié ce qui m’est personnel… Estimez-moi assez pour me croire désintéressée dans cette question délicate ; ma vanité de femme n’a ressenti, j’espère, aucune blessure de ce qui s’est passé entre nous.

HENRI.

La vanité ! ange de douceur et de modestie !… Oh ! va, je sais bien que, chez toi, ce n’est pas le dépit, c’est la tendresse qui souffre !… D’ailleurs, je ne t’ai pas trompée, n’est-ce pas, Françoise ?…

FRANÇOISE.

Non ! (À part.) Je me suis trompée moi-même !

HENRI.

Le jour où je t’ai offert mon nom, je croyais devoir hériter, pouvoir emprunter…

FRANÇOISE.

C’est vrai ! c’est vrai !