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est si myope ! on ne devrait jamais donner de rendez-vous à des myopes ! Et puis c’est d’un mauvais cœur, d’avoir exigé une entrevue, lorsqu’il pouvait si bien me rendre cette lettre chez nous, dans un moment où l’on aurait eu le dos tourné. Dirait-on pas qu’elle est grosse comme une malle ! Est-ce qu’il voudrait me compromettre ? Oh ! non, il est trop simple. Ah ! le voilà enfin ! Eh bien, il ne voit donc pas la maison ? il s’en va dans le bassin… Hem ! hem !… Est-ce qu’il est sourd aussi ? Il m’a vue… il vient. (Étouffant sa voix.) Eh bien, me voilà ; m’apportez-vous ?… Non ? Il me fait signe de me taire ; il y a donc du monde dans le jardin ? Il écrit quelque chose. (Écoutant vers le fond.) Ah ciel ! qu’est-ce qui arrive par là ? Je me sauve, moi !

Elle s’enfuit par la porte de droite.




Scène II


HENRI, seul, venant du fond.

Les portes et les fenêtres ouvertes ; donc, ils sont ici. Mais je ne vois personne. Ah ! ils sont au jardin peut-être ! (Il va à la fenêtre.) Quel est donc ce monsieur, et que me veut-il ? Que de gestes ! Je ne comprends rien à sa pantomime. Je vas le saluer. (Entre ses dents.) J’ai bien l’honneur… Eh bien, il ramasse un caillou pour me le jeter ? Est-ce qu’il est fou, cet animal-là ? Il n’a pourtant pas l’air bien méchant. (Il se range ; un caillou enveloppé d’un papier arrive par la fenêtre et tombe au milieu du théâtre. Henri le ramasse.) Ah ! oui-da ! c’est de l’écriture moulée ! Si je lui rendais son caillou ! il y tient peut-être ! Non, le voilà qui s’enfuit. Ah çà ! que signifie l’aventure ? (Il lit.) « Vous voulez m’arracher le seul souvenir, la seule preuve que j’aie de mon bonheur et de votre amour ! Je comprends que vous allez vous marier. Eh bien, vous n’aurez cette lettre qu’avec la vie de celui qui dédaigne de se venger ! » Il y a beaucoup de que. (Retournant le papier.) Pas d’adresse, et signé Celui qui ! Il est évident que ce n’est pas pour moi. Pourquoi