Page:Sand - Theatre complet 4.djvu/339

Cette page n’a pas encore été corrigée

URBAIN.

Comme je prends tout.

LE DUC.

Et… naturellement elle t’a planté là ?

URBAIN.

Elle est… morte.

LE DUC.

Ah ! diable ! c’est autre chose. Et quand est-elle morte ?

URBAIN.

Il y a trois ans.

LE DUC.

Je vois qu’une seule passion a rempli toute ta vie. Mais, si tu l’as pleurée trois ans, c’est assez, c’est bien gentil.

URBAIN.

Tais-toi, Gaétan, tais-toi ! c’est moi qui l’ai tuée.

LE DUC.

Tu t’imagines ça ! est-ce qu’on tue les femmes ? Quand elles meurent, c’est qu’elles ne peuvent plus faire autrement.

URBAIN.

Ne ris pas, je t’en prie ; ma douleur est sans remède, parce que ma faute est sans excuse. J’ai employé ma volonté, mon intelligence, toutes les forces de mon âme, non à combattre ma passion, mais à l’inspirer à un pauvre être qu’elle a brisé. Je le dirai tout ;… aujourd’hui, je ne peux pas. Ce souvenir m’étouffe… et… j’en meurs, Gaétan !

LE DUC.

Toi ? tu l’aimes toujours ?

URBAIN.

Je ne peux pas regretter une vie de lutte et de tourments ; mais je ne peux plus aimer, voilà ma punition.

LE DUC.

Allons donc ! pour un seul roman ? Tiens, il n’est guère possible d’avoir aimé plus souvent que moi ? Eh bien, je ne me donne pas trois mois de campagne…

URBAIN.

Oh ! toi ! tu es de ces natures vivaces qui refleurissent à