Page:Sand - Theatre complet 4.djvu/337

Cette page n’a pas encore été corrigée

LE DUC.

Oh ! oui ! pardonne-moi, je t’estime, je t’admire, je te vénère ; tu es simple, bon et grand ! et moi, je suis un imbécile, un ingrat, un animal ! tu es mon meilleur ami, et je ne m’en suis jamais aperçu, et j’ai donné mon temps, mon cœur et mon argent… et celui de mon père, et celui de ma mère, et le tien, à des coquins et à des… Qu’est-ce que je peux faire pour toi ? Aimes-tu une femme ? faut-il l’enlever ? faut-il tuer son mari ? Veux-tu que j’aille en Chine, en Sibérie, en enfer ? Dis !

URBAIN.

Si tu m’aimais, nous serions déjà quittes.

LE DUC.

Mais je t’aime ! je t’aime de toute mon âme ! Seulement, je voudrais trouver tout de suite un moyen de te le prouver.

URBAIN.

Il y en aurait un dont tu ne t’avises pas.

LE DUC.

Si fait ! me corriger ! Eh bien, je me corrigerai. Pourquoi pas ? Je suis encore jeune, que diable ! à quarante ans, on n’est pas fini, on n’est qu’un peu abîmé. Je me rangerai, c’est dit ! d’autant plus qu’il le faut. Je ne suis pas à plaindre, après tout ! Je me referai une santé, une jeunesse, et puis tu disposeras de moi. J’irai passer l’été avec ma mère et toi à la campagne. Je vous raconterai des histoires, je vous ferai rire. Voyons, console-moi, aide-moi à faire des projets ; car je ne sais plus où j’en suis quand je vois tout le mal que j’ai fait, et combien je suis malheureux !

Il pleure.
URBAIN, allant à lui.

Courage, mon grand enfant ! la mauvaise fortune est finie, la bonne commence peut-être !

LE DUC.

Oui, tu m’apprendras ton secret pour être heureux ; quel est-il ?