Page:Sand - Theatre complet 3.djvu/71

Cette page n’a pas encore été corrigée




Scène VI


BERNARD, puis PATIENCE.


BERNARD.

Ah ! c’est trop souffrir ! il faut que ça finisse ! Elle ne m’aimera jamais. Elle croit peut-être que je tiens à l’épouser pour être riche ! me prend-elle pour un ambitieux, pour un hypocrite ?… Ah ! c’est ma faute, aussi ! pourquoi me suis-je obstiné à rester près d’elle ? Dire que je ne peux pas m’arracher d’ici ! et pourtant j’y meurs d’ennui et de colère ! Je ne m’intéresse à rien de ce qui les amuse, je ne me soucie de rien que d’elle ! et elle m’en fait un crime ! Elle veut que j’aime quelque chose qui n’est pas elle ! Quoi ? des livres ? (Il jette par terre les livres et les cahiers restés sur la table.) Des arbres ? des fleurs ? (Il brise un arbuste.) Moi-même peut-être ! non !… je me hais et j’ai envie de me tuer, puisqu’elle me déteste !… (Patience paraît) Ah ! c’en est assez ! je mourrais dans cette maison ! je la quitterai, j’irai vivre au loin, dans quelque désert, à la tour Gazeau, avec le souvenir de ce pauvre Léonard, qui me l’avait bien prédit, ce qui m’arrive !

PATIENCE, qui est entré sans bruit et qui a écouté les dernières paroles.

Qu’est-ce que vous dites donc là, mon pauvre garçon ?

BERNARD.

Qu’est-ce que ça vous fait, à vous ?

PATIENCE.

Ça me fait.… ça me fait de la peine.

BERNARD.

À vous ?

Il lève les épaules et s’assied.
PATIENCE.

Oui, à moi ! et je veux que vous me parliez ! Oh ! dame, je suis comme vous, je suis têtu ! nous nous ressemblons par plus d’un côté, allez ! nous sommes des gens de campagne