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DANIEL, tourmenté, s’approchant d’Adrien.

Les peines ! vous êtes donc malheureux, vous ?

ADRIEN.

Non, Daniel ! je suis pauvre, voilà tout, et cela m’empêche d’être libre.

DANIEL.

Et, si vous étiez libre, que feriez-vous ?

ADRIEN.

Ah ! je vivrais à ma guise. Je me retirerais à la campagne. Ç’a toujours été mon rêve ! Les champs, les jardins, l’agriculture, la terre ! Vous le voyez, mes amis, c’est un rêve de marin. Mais il ne se réalisera pas, j’en suis certain, et à peine l’ai-je touchée, cette terre chérie, qu’elle manque sous mes pas ! J’arrive, je ne trouve plus qu’un petit coin, qui suffirait peut-être à mon ambition si j’étais vieux et infirme, mais qui ne suffirait pas à occuper honorablement les forces de ma jeunesse. Mais je vous attriste, Lucie, et je ne sais vraiment pourquoi je vous parle tant de moi. Vous avez l’habitude d’occuper ce salon, restez-y ; j’ai des lettres à écrire, et je vous demande la permission de me retirer. (Lucie prend un flambeau et le remet à Daniel.) Non, je ne dois pas m’habituer à être servi ; merci, mon bon Daniel ! Bonsoir, chère Lucie. À demain ! (Daniel le conduit jusqu’à la porte de gauche.) Ah ! dites-moi, Daniel !… priez M. Stéphens de venir me trouver. (Bas.) Je veux lui parler sérieusement à propos de Lucie.

DANIEL.

L’Américain ? Je l’ai vu sortir de la maison.

ADRIEN.

Eh bien, quand il sera rentré.

Il sort.