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Non, c’est absurde, cet homme est fou !… ou bien, généreux à sa manière, il me donne avis des plans de nos ennemis, sans oser me les révéler clairement !… Allons, il faut être en état de défense. (Il va sonner.) Et Laurent qui ne rentre pas ! cela m’inquiète ! (Se tournant vers la porte de côté.) Êtes-vous là, vous autres ? Venez ! venez tous !

Il va ouvrir la grand’porte.




Scène VII


ANTOINE, LOUIS, PIERRE, GAUCHER, LÉONARD, JEAN, Domestiques, Braconniers, Paysans, Colporteurs, etc., tous gens de mauvaise mine, formant un groupe d’une vingtaine de personnes ; puis BERNARD, TOURNY.


Les Mauprat entrent les premiers par la droite, et vont se ranger le long de la table de gauche. Les autres, venant du fond, défilent devant Jean, qui les accueille avec des sourires, des poignées de main, des tapes sur l’épaule ; ils vont se ranger à la table de droite. Tourny entre le dernier.

JEAN.

Bien, mes amis ! Salut, mes enfants. Je vois avec plaisir que nous sommes plus nombreux que je ne l’espérais par ce mauvais temps. Asseyez-vous, mangez bien et buvez mieux ! J’ai à parler. Mais Bernard ! où est donc Bernard ?

BERNARD, entrant d’un air farouche.

Eh bien, qu’est-ce que c’est ? Le voilà, Bernard !

Il passe devant Jean sans daigner le regarder, traverse le théâtre et va s’asseoir au premier plan de la table de gauche, en tournant le dos à Jean, tandis que les autres oncles restent debout un instant. Bernard met le coude sur la table et paraît complètement insensible, par mépris de ce qui se passe autour de lui. Jean, qui a suivi Bernard d’un regard oblique plein de courroux et de haine, vient se placer au milieu du théâtre entre les deux tables, il s’appuie sur le tonneau comme sur une tribune, pour parler tantôt avec emphase, tantôt avec familiarité ; à droite et gauche, on boit, on mange en l’écoutant.