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ACTE DEUXIÈME


Une mansarde d’artiste. Porte au fond à gauche ; porte de côté à droite, fenêtre à gauche ; table devant la fenêtre ; au milieu du théâtre, table ronde couverte de livres, sphères, etc. ; derrière la table, canapé, chaises.




Scène PREMIÈRE.


FLAMINIO, seul devant une table et peignant une figurine en bois en chantonnant.

     Dansez, pêcheur napolitain.
     Sans nul souci…

(Parlant.) Allons, c’est fini, ça ira comme ça.

     Sans nul souci du lendemain.

(Parlant.) Sans nul souci ? Il fut un temps, bien près de moi… quoiqu’il me semble avoir franchi des siècles depuis moins d’une année, où je chantais cela naïvement ! Aujourd’hui, j’ai l’amour, le bonheur et l’épouvante ! Ne pas croire en moi, mon Dieu ! quand tout en moi lui appartient, jusqu’à la moindre de mes pensées ! (Il se lève.) Ah ! malheureux ! tu aurais dû ne jamais réfléchir, ou ne jamais aimer ! Aujourd’hui, c’est en vain que tu es sincère, purifié, irréprochable ! La vertu est cruelle et l’innocence soupçonneuse !… Deux jours sans la voir ! Il me semble qu’il y a déjà deux ans ! Non, je ne pourrai pas me tenir parole ! Elle m’écrira… elle va m’écrire ! Elle viendra peut-être ! Elle est bien venue déjà deux fois… m’ôter mon courage et ma fierté ! mais viendra-t-elle une troisième ? (Il écoute un bruit au dehors.) Est-ce une voiture ? Non, c’est le roulement d’un tambour de basque ; quelques musiciens de carrefour ; d’anciens collègues, d’anciens camarades, peut-être ! (Il a mis de l’argent dans un morceau de papier et le jette par la fenêtre sans regarder.) Et elle épouserait ce passé de misère et d’abandon ! elle ! une grande dame ! la veuve d’un pair d’An-