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vardage critique, qui est une chose toute de circonstance, tout empruntée à son tour, et mal empruntée, à la manière française du temps ; si l’on fait la part de l’esprit encore assez rabelaisien de l’époque ; enfin, si l’on cherche à toucher du doigt la moelle éparse dans tous ces os disloqués, on retrouve une franchise de gaieté, un entrain de reparties, une abondance d’épithètes originales, et des formes burlesques qui ont encore leur caractère propre, et profondément italien, en dépit du pressurage que Molière leur a fait subir.

Tout est plus grossier comme art que dans l’école française ; mais aussi, tout y est plus franc et plus dégagé d’allures. Les types classiques sont plus accusés, et, si la ligne n’a pas la pureté que Molière a su lui donner, elle a des écarts et des cambrures d’un effet plus saisissant. Enfin, la couleur, moins harmonieuse, est plus éclatante par endroits, et il faut, en dépit de tout, retrouver, à travers ce fatras, comme une intuition de ce que l’esprit devait saisir par les sens, lorsque Dominique ou Fiorelli improvisaient et mimaient le véritable génie bouffe de la comédie italienne.

Maintenant, a-t-on le droit de regarder comme une fantaisie oiseuse et sans but le petit travail d’esprit qui consiste à repêcher dans une mine déjà fouillée, et presque épuisée par des mains habiles et puissantes, un dernier filon imperceptible échappé aux grands explorateurs ? A-t-on le droit de dire, quand on n’en sait rien, que, là, il n’y avait rien à chercher ? Dites que le chercheur n’y a rien trouvé qui vaille, c’est votre droit ; mais sachez qu’il y avait et qu’il y a encore, dans cette mine, quelque chose de précieux dont vous pourrez faire votre profit si vous avez l’œil plus fin et la main plus sûre que celui qui vient de le tenter. Il y reste, du moins, quelque chose qui ne s’est pas encore infusé dans l’esprit français : c’est le tour du raisonnement singulier, fantasque, et cependant clair et naïf, qui caractérise la facétie italienne. La facétie française est dans les mots, dans le trait ; l’autre est dans l’idée. Pierrot, qui est, dans le répertoire de la fin du grand siècle, un villageois parlant berrichon (ce n’est pas ma