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Scène XIV


MOLIÈRE, BARON.


BARON.

Qu’avez-vous à m’ordonner, mon père ?

MOLIÈRE.

Ton père ! Suis-je vraiment un père pour toi ?

BARON.

Oh ! oui, un tendre père, et vous ne douterez jamais de mon cœur, vous !… Mon Dieu ! comme vous êtes pâle !… Souffrez-vous davantage ?

MOLIÈRE.

Je me porte bien.

BARON.

Mais vos mains ne sont point réchauffées !

MOLIÈRE.

J’ai un froid qui me tue ; n’importe ! ces mains-là ont encore de la force.

BARON, à part.

Oui, elles meurtrissent les miennes. Est-ce une convulsion ?

MOLIÈRE.

Baron, vous devriez connaître que vous n’avez point de meilleur ami que Molière !… Oh ! ne rougissez point. Je ne vous veux rien reprocher ! Ce que j’ai fait pour vous, le premier venu ayant quelque argent en la poche et quelque bonté en l’âme, l’eût fait aussi bien que moi. Mais ce dont je me vante auprès de vous, Baron, c’est de vous avoir aimé comme un père aime son fils. Et cela, voyez-vous, ne s’acquitte point en paroles. L’amour seul peut payer l’amour, et, si vous n’avez point dans le cœur une amitié forte et véritable pour Molière, Molière est un père bien malheureux, et Baron un cœur bien misérable !