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BARON.

Duparc !…

DUPARC.

Je vous dis que la torture ne m’en ferait point démordre ! Le roi est un homme d’esprit, un galant homme à certains égards, je le veux bien ; mais il a un côté vicieux, c’est celui par lequel il est hypocrite. Homme de voluptés secrètes et d’intolérance publique, il n’avait pas reconnu tout d’abord qu’il y avait dans le Tartufe, à l’insu même de Molière, quelques traits de sa ressemblance. Mais sa mauvaise conscience le lui a dit plus tard, et, tout en jurant à Molière qu’il ne voyait rien d’irréligieux dans sa pièce, il n’en a pas moins laissé interdire la représentation pendant bon nombre d’années, l’exposant ainsi aux insultes de ses ennemis et aux calomnies des fanatiques. S’il cède enfin, c’est que, d’après mon conseil, Molière a mis de la vigueur dans son dernier placet… pas assez à mon gré, car, si j’eusse été en sa place, j’eusse écrit : « Sire, vous êtes un plaisant cuistre, vous qui avez trois enfants de la Montespan et qui n’en faites pas moins vos dévotions avec grand apparat, de vouloir nous empêcher… » Eh bien, cela vous fait rire, vous autres ?

BRÉCOURT.

Certes ! voilà qui eût admirablement raccommodé nos affaires !

MOLIÈRE.

Le mieux est de rire, en effet, des boutades de Duparc, et le roi rirait lui-même, s’il pouvait les entendre.

DUPARC.

Par la mordieu ! non, Molière ! il ne rirait point de cela !

MOLIÈRE.

Écoute, mon ami. Si tu respectais quelque chose au monde, tu respecterais l’amitié… Oui, je dis l’amitié que j’ai dans le cœur pour cet homme qu’on appelle Louis XIV. Oh ! je sais bien, mon Héraclite, que tu me reproches de lui trop sacrifier mon temps, mon talent et ma santé. Mais considère, je te prie, que, s’il m’a commandé parfois des choses précipitées, il m’a