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En me faisant cette question, elle s’avança sur la petite terrasse garnie de fleurs qui occupait la façade sud de la bastide et d’où l’on découvrait la pleine mer au delà de la plage des Sablettes.

— Oui, oui, ajouta-t-elle, le cap Sicier est bien clair. Quelle grande vue ! Vous plaît-elle autant que celle de l’est ?

— Non, Elle est plus grande, puisque l’horizon maritime est sans bornes, et elle paraît plus petite.

— Vous avez raison ; elle a des lignes trop plates, et le baou (rocher) bleu, vu d’ici, a de vilaines formes. À gauche, au sud-ouest, c’est très-beau, la haute falaise, et la plaine qui nous en sépare est bien jolie au lever du soleil.

— Vous voyez donc lever le soleil ?

— Toujours, sauf à me rendormir après, si Paul n’est pas éveillé. Il dort dans ma chambre, et j’aime à le regarder au reflet du matin rose, parce qu’alors il me paraît tout rose aussi, mon pauvre enfant pâle ! Et puis je savoure le bonheur inouï de la solitude avec lui. Songez donc, j’ai aspiré à cela depuis qu’il est au monde, et j’ai toujours été obsédée par un entourage où si peu de personnes me plaisaient ! Croiriez-vous que j’ai passé des années sans entendre chanter un oiseau ? Il y en a bien peu ici. Ces cruels Provençaux, après avoir détruit tout le gibier, s’en prennent aux rossignols. Il y a encore deux ou trois fauvettes sur les pins du jardin, et je les écoute.