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sanglante d’un soldat enivré du sot amour-propre du troupier d’Afrique.

Vous aviez à choisir entre deux maîtres, le prolétariat irrité, furieux, et la bourgeoisie atrocement réactionnaire en ces jours-là. Vous avez préféré la bourgeoisie. Tout égarée, tout abominable qu’elle était à ce moment dans son ivresse de haine pour le peuple, vous avez cru qu’elle serait encore plus sage et plus humaine dans sa victoire que le peuple ; vous avez cédé à une probabilité, à une démonstration politique ; vous avez vu, le lendemain, le beau résultat de votre prudence, et vous appelez cela avoir sauvé la République !

On a célébré une victoire plus hideuse encore que celle de Louis Bonaparte, puisque les citoyens y ont fait l’office de soldats ivres et abrutis. On a proclamé l’état de siège, donné la main à tous les ennemis de la République, posé enfin les fortes bases d’un coup d’État qui arrive aujourd’hui tout naturellement et sans effort, et qui n’est que la suite et le complément de la dictature de votre chef, le malheureux et déplorable frère du grand et généreux Godefroy !