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études au collège de Versailles, Gabriel fut envoyé à Mexico[1], dans la maison de commerce de son père. Mais Gabriel Ferry fut bientôt emporté par l’ardeur de connaître et de posséder en artiste ce monde si bizarre, si pittoresque et si révoltant ; cette civilisation qu’il a lui-même qualifiée de douteuse, et dont il a décrit les drames terribles ou burlesques avec tant de verve et d’exactitude !

Il voulut bientôt parcourir le Mexique tout entier et même pénétrer dans l’immense désert qui le sépare, au nord, des États-Unis, où Cooper, dont il devait un jour devenir l’émule, a placé tant de scènes de ses admirables romans.

Une affaire importante, que son père avait nouée avec la Californie, alors presque entièrement sauvage, lui permit de traverser la Sonora, de voir ensuite les quelques huttes qui devaient être, vingt ans plus tard, la ville de San-Francisco, de pénétrer dans le désert, après avoir navigué quelque temps dans le golfe de Californie, de revenir sur ses pas à travers les dangers de ces routes mal hantées, d’explorer une partie du littoral, enfin de consacrer quatorze mois à une promenade de quatorze cents lieues à cheval.

Acteur ou témoin oculaire de toutes ces aventures qu’il a racontées plus tard, il se piquait de n’avoir presque rien inventé, et de devoir autant à la fidélité de sa mémoire, qu’à la fécondité de son imagination. Cette double faculté était en lui pourtant, et ses

  1. À la fin de 1830.