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plus rare ! Il a écrit, il a mis sa croyance dans ses écrits. Il a trouvé que ce n’était pas assez, il a voulu donner plus que son talent, il a donné sa volonté et sa vie à la plus belle des causes, au salut de l’Italie. Il s’est enrôlé sous le drapeau de Garibaldi.

Était-ce un coup de tête ? On pourrait le penser d’après le malaise de certaines existences morales au temps où nous vivons, d’après le goût des aventures qui caractérise les âmes poétiques, d’après la curiosité qui est l’heureux lot de la jeunesse. Eh bien, quand on a lu la relation que nous avons sous les yeux, on est frappé du sérieux de l’acte et de l’écrit. C’est une belle action et c’est un beau livre, n’hésitons pas à le dire ; mais c’est aussi un bon livre et une bonne action.

La France militaire avait fait son œuvre sur les champs de bataille du nord de l’Italie ; la science avait donné ses ressources, la bravoure éprouvée et la jeunesse ardente avaient donné leur sang et leur élan. L’Autriche était chassée du Milanais ; mais, au midi, la liberté n’était pas conquise, l’unité n’était pas faite. Nous n’avons pas à juger ici le trop d’incertitude des uns, le trop d’impatience des autres ; nous croyons qu’en dehors de la logique des faits historiques, il y a une intervention mystérieuse, une logique de l’enthousiasme, une sagesse téméraire où la main de Dieu se charge de tracer le poème divin des rédemptions. Maxime Du Camp compare Garibaldi à Jeanne d’Arc. Jamais Garibaldi n’a été mieux compris, jamais il ne sera mieux défini.