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sera perdu pour leurs contemporains remis à flot.

L’auteur du Novum Organum va plus loin que nous dans cette voie d’espérance. Elle ose dire du fond de sa retraite, où les vains bruits du monde n’arrivent pas jusqu’à elle, et ne soulèvent pas de nuages sur son esprit droit et confiant, que les facultés humaines acquerront peut-être dans l’avenir une puissance inconnue aux siècles qui nous ont précédés, une clarté pour ainsi dire évangélique, la certitude de l’immortalité. Il faudrait citer et il faudrait lire tout le chapitre intitulé Confiance en Dieu, qui est très beau dans son effort pour concilier la raison avec l’émotion. Ému, et presque persuadé nous-même après l’avoir lu, nous pouvons du moins affirmer que la foi fera ce miracle, puisque, sans jouer sur les mots, on peut dire que croire, c’est déjà être.

Nous conseillons aux femmes intelligentes la lecture de ce livre, et particulièrement de la partie intitulée Résumé, qui semble s’adresser à elles de préférence, avec une grande délicatesse de sentiment. La manière de l’auteur est originale, Ses défauts sont presque toujours des qualités. Son style court toujours et vole souvent. Beaucoup de facultés semblent parfois gêner la direction de ce vol. Elle est savante, elle est poète et elle est femme. Elle semble parfois aller au hasard de l’inspiration et quitter son idée pour une autre idée qui l’emporte ailleurs. Mais ce désordre apparent n’amène jamais la contradiction. C’est une abeille qui puise partout son miel, et non un papillon qui s’enivre pour s’enivrer. Un soleil calme éclaire