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même les personnes et les faits, sans cesser d’être d’accord sur les principes ; comme enfin nous sommes parfaitement libres, vis-à-vis les uns des autres, de conserver et d’exprimer notre sentiment personnel, je vous demande de pouvoir exprimer ici le mien tout entier. Le moment est venu pour moi de le faire, puisque, malgré une appréciation différente, sur certains points, de la vôtre, je suis resté avec la Vraie République, à l’heure du danger, tout prêt à subir ma part des persécutions dont ce journal pouvait être l’objet.

Ce préambule était nécessaire, parce que, depuis deux jours, la Vraie République peut et doit même s’être prononcée sur l’attitude du gouvernement dans l’affaire Louis Blanc. Je ne sais pas comment elle s’est prononcée, je ne viens donc pas faire un acte systématique de contradiction ; mais, de quelque façon qu’elle se soit prononcée, mon opinion reste la même.

Vous savez l’affection que je porte à Louis Blanc, l’estime que j’ai pour son caractère et pour son talent, la sympathie que m’inspirent ses idées, qui sont les miennes à beaucoup d’égards ; je n’ai pas vu Louis Blanc depuis un mois, peut-être plus. Je n’ai pas reçu de lettres de lui. Je n’ai su, ni directement ni indirectement, ce qu’il pensait de la manifestation du 15 mai ; mais je le sais d’une manière tout aussi certaine que si je l’avais vu tous les jours, et que si je ne l’avais pas quitté d’un instant. Je le sais, parce que l’honneur d’un homme comme lui est la plus sûre de toutes les garanties. Louis Blanc a toujours été contraire, énergiquement, absolument contraire à l’idée de la viola-