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gands ; ils ne vinrent pas. Eh bien, 1848 aura été une seconde année de la peur. On a rêvé de communistes anthropophages, et on a mieux fait, on les a vus. Tout candidat mis à l’index par les réactionnaires, à quelque nuance républicaine qu’il appartînt, s’est transformé en communiste aux yeux des populations effarées. Nous connaissons des républicains anti-socialistes qui ont échoué comme communistes ; des rédacteurs de l’Atelier qui ont été atteints et convaincus de communisme. Comme les populations rurales, et même celles de certaines villes, n’avaient jamais entendu prononcer ce mot-là, il fallait bien l’expliquer par quelque fait sensible.

Ainsi, le citoyen un tel bat sa femme.

— Mais non ! il se couperait plutôt le bras.

— Oh ! n’en croyez rien, il la flatte en public, mais il la martyrise en secret.

— Et pourquoi cela, grand Dieu ?

— C’est qu’il est communiste.

Cet autre a mangé la dot de sa femme.

— Mais il n’est point marié et ne l’a jamais été !

— Si fait : il était marié et il ne l’était pas ; il est communiste !

Quant au troisième candidat, prenez garde ! c’est un homme de M. Ledru-Rollin, qui est communiste. — Mais le cinquième se recommande de M. Lamartine.

— Raison de plus : M. Lamartine est communiste, tout le gouvernement provisoire est communiste ; ne prenez que des hommes de la localité qui n’aient jamais mis le pied à Paris, et encore consultez-nous ;