habitudes. Les animaux libres ont une vie très-régulière, et il suffit de suivre une de leurs journées pour savoir l’emploi de tous leurs autres jours.
— Mais le lièvre atteint hors de portée ?
— C’est que son fusil porte extraordinairement loin comparativement aux nôtres.
— Mais les sept perdrix ?
— C’est qu’il a tiré au plus serré du bataillon. Je ne lui conteste pas d’être plus adroit que nous.
— Mais ses prédictions ?
— Le hasard aide les gens heureux, et le bonheur est aux insolents.
— Avec cela, on expliquerait toutes choses, et pourtant il me semble que cela n’explique rien.
— Attends à demain ou à la semaine prochaine, pour voir comment notre sorcier gouvernera le hasard. Tu verras qu’il ne tombera pas toujours aussi juste qu’aujourd’hui, et que son Georgeon lui fera fiasco plus d’une fois.
Nous nous mîmes à chasser presque tous les jours avec Mouny. Nous y trouvions un plaisir extrême, mon frère, parce qu’il lui faisait rencontrer beaucoup de gibier, moi, parce qu’il nous conduisait dans les sites les plus charmants et les plus ignorés de la Vallée Noire. Il continuait son système de conjuration contre les influences pernicieuses, et ses prédictions. Je dois dire, pour la vérité du fait, que celles-ci ne se réalisèrent pas toujours parfaitement, mais qu’elles se réalisèrent vingt-cinq fois sur trente, et cela dura non quatre jours, mais quatre ans et demi, pendant lesquels Mouny-Robin prit sur nous, comme chasseur, et peut-être ; aussi un peu comme sorcier, un ascendant que peu à peu nous cessâmes de combattre. En étudiant avec lui les mœurs du gibier, nous pûmes bientôt nous convaincre que ses habitudes n’étaient pas aussi régulièrement tracées que nous l’avions cru d’abord. Plus