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voir dans ce monde, où on les laisse faire sans faire comme eux. — La maladie c’est donc la misère. — Mais ce n’est pas tout. Il y a encore le manque d’ouvrage. J’ai toujours entendu dire aux pauvres : Travaillez ! Je n’ai pas vu que ça leur donnât de l’ouvrage quand il n’y en a pas. Plus la propriété est divisée autour de nous, c’est-à-dire plus il y a de gens un peu aisés, plus ceux qui n’ont rien deviennent inutiles, et, on a beau dire, je vois bien que c’est toujours le plus grand nombre. — Il y a donc, outre les commandements de l’Église, outre les maladies et les accidents, des chômages forcés. Il n’y a pas un seul journalier qui n’ait souffert grandement de toutes ces choses-là. Une fois endettés, nous ne pouvons plus en sortir. L’homme qui n’a pas de garantie n’a de ressources que chez les usuriers. Il ne peut payer l’intérêt. Au bout de deux ou trois ans, on l’exproprie ; la dette se trouve payée par là, mais il faut recommencer, et, quand une fois on a eu du malheur, on ne retrouve pas aisément un crédit de dix écus pour ne pas coucher dehors, soi, sa vieille mère ou son vieux père infirme, sa pauvre femme enceinte ou nourrice, et ses petits malheureux quasiment nus.

Voilà, je crois, un sort assez dur. Eh bien, nous nous sommes en partie sauvés jusqu’à présent dans nos campagnes. Grâce aux pâturages communaux, la chèvre et l’ouaille vous font une nourriture un peu moins mauvaise, des habits un peu moins coûteux, et avec ce profit des élèves on peut parer aux coups de malheur. Eh bien, je ne sais pas ce qui s’est passé