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pas le plus parfait accord entre nous, quand la lutte de races aura cessé de nous absorber.

À l’heure qu’il est, avec l’ennemi à nos portes, il est certes trop tard pour résoudre ce que nous avons laissé en suspens. En face de l’amour de l’humanité qui est une foi permanente et inaliénable, se dresse l’amour de la patrie, sentiment plus exclusif et plus fiévreux. Qu’il était beau, cet amour sacré quand il rimait dans nos âmes avec liberté chérie ! C’est qu’alors il n’était pas en contradiction avec l’amour de la famille Universelle. Dans les âmes pures et tendres qu’il exaltait, il avait un sens sublime, celui delà lutte contre le passé féodal, celui de l’espoir de la fraternité rétablie entre tous les hommes. Chanter la Marseillaise avec d’autres idées est désormais un sacrilège ; mais 92 et la Révolution tout entière n’ont-ils pas été profanés dans les souvenirs du temps présent ?

N’importe. Il y a encore de l’écho pour les chants de triomphe patriotique, et, si nous devons, au contraire, suspendre nos harpes aux saules brisés par la mitraille, n’oublions pas qu’il y a pour les nations civilisées quelque chose de mieux à faire que la guerre à l’étranger. Il y a la lutte sociale, qui est tout le contraire de la guerre civile. La guerre civile, elle est facile à allumer. Il n’est pas besoin pour cela de talents militaires, il suffit de lancer Bazile et de calomnier. Si, comme il semble, il y a un parti qui emploie ces moyens bien connus pour amener des jacqueries dans toute la France, tenons-nous sur nos gardes, et laissons-nous massacrer plutôt que de répondre à