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portaient, en lettres de bluets, de marguerites et de coquelicots, cette légende étonnée de se trouver là tracée par la main des femmes et des enfants : « Gloire au Dieu des armées ! »

Peut-être en était-il ainsi aux jours de la foi naïve, au début des premières croisades. Dès lors aussi, il s’agissait de délivrance. On savait, ou on croyait savoir, qu’il y avait au loin des chrétiens opprimés, appelant les braves à leur secours, et une pensée généreuse fut le prestige de ces premières expéditions.

Aujourd’hui, c’est encore une croisade au nom de la liberté ; mais non plus seulement la liberté matérielle de quelques coreligionnaires ; c’est la liberté physique et morale de tout un peuple qui se montre digne de revivre. Aujourd’hui, c’est encore la lutte de la civilisation contre les idées oppressives de la barbarie ; mais c’est une lutte encore plus religieuse, car les questions de culte ne sont là pour rien, et il s’agit du principe d’indépendance sans lequel l’homme ne peut croire à rien, ne peut aimer réellement rien, au ciel ni sur la terre, puisqu’il n’existe plus, du jour où il ne compte plus parmi les nations.

Tout le monde sent si bien cette vérité, que les dispositions du peuple lombard inspiraient, des doutes au commencement de la guerre. On pouvait compter sur la partie éclairée de cette nation ; mais le paysan qui, en tout pays, redoute le changement et supporte toutes choses à la seule condition que l’on ne marchera pas sur le sillon qu’il vient d’ensemencer, celui-là, le patient, le prudent (logicien au jour le jour),