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s’attaque à sa personne, il devient éloquent, serré, clair et fort. Il déjoue les attaques les mieux combinées. Il forme un parti puissant en apparence, puisqu’il s’appuie un peu partout ; et, dans les provinces, des républicains sincères, ardents, irréprochables (nous en avons vu) abjurent leurs griefs, passent l’éponge sur la sombre tragédie de juin, et votent pour Cavaignac, croyant voir en lui, non leur idéal, mais l’homme nécessaire à la circonstance, le sauveur de la République menacée par le parti bonapartiste.

Et, pendant que le général Cavaignac faisait ce beau rêve de force et de gloire, pendant que le parti bonapartiste se livrait à des intrigues dont la candide majesté du suffrage universel doit le faire rougir à l’heure qu’il est, que faisait le peuple, le peuple qui n’est pas politique, qui n’entend rien aux questions de forme ; le peuple qui, d’un bout de la France à l’autre, dans les villes et dans les campagnes, avec connaissance de cause ou sans le savoir, est purement socialiste, c’est-à-dire jaloux de son droit et pénétré de ses besoins ? Eh bien, le peuple disait : « Général Cavaignac, vous êtes plus habile qu’on ne le pensait. Donc, vous êtes plus coupable. Vous aviez assez de talent pour entraîner l’Assemblée nationale, vous l’avez fait à votre profit et jamais au nôtre. Vous vous êtes fait décerner des brevets de mérite au nom de la patrie ; vous n’avez pas obtenu l’amnistie de nos déportés. Vous avez fait des discours de six heures pendant lesquels vous avez charmé votre auditoire, et où il ne s’agissait que de vous. Mais vous n’avez