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raisonnée et amenée à point pour la grande circonstance où nous sommes, et qui nous a surpris tous, maîtres et disciples, simples et docteurs.

Mais ne nous plaignons pas de cette surprise de la Providence ; bénissons, au contraire, la main divine qui nous précipite sur le chemin de la vérité ; que personne ne dise : « C’est trop tôt, nous n’étions pas prêts ; nous ne savons que faire. » Non, non, quand le tocsin populaire ébranle la voûte des cieux, quand la nuée s’entr’ouvre, quand le voile du temple se déchire du haut en bas, c’est que l’heure est venue, et que l’esprit de Dieu va se faire entendre. Nous eussions bien pu vivre encore dix ans, vingt ans, cent ans, dans cet état de fausse paix qui n’était qu’une guerre monstrueuse entre le cœur et l’intelligence, sans faire un pas de plus vers la vérité. Le calme de la mort ne féconde rien, et, tu le sais bien, ô peuple logique et sensé de la France, que tes prétendus maîtres s’égaraient de plus en plus dans leurs misérables systèmes d’économie politique et de gouvernement ! Tes amis mêmes travaillaient péniblement : la lumière d’en haut ne leur envoyait qu’un faible reflet ; la solitude desséchait leur âme ou décourageait leurs recherches. Parmi les meilleurs, plusieurs devenaient fous, plusieurs périssaient de tristesse, et ceux qui vivaient encore d’une vie saine et complète auraient fini par subir le même épuisement : il n’est pas permis d’en douter.

Et d’où viennent donc cette maladie des intelligences, ce progrès si lent et si obscur, ces solutions énigma-