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en tête de leur colonne, et, dans leurs mains, le flambeau de l’avenir brille d’un plus vif éclat que lorsqu’il était promené dans la tourmente. Ils sont loin, ceux que nous suivions à travers le tumulte des événements, ils ne sont plus à nos côtés, agitant la flamme pour éclairer nos chemins. Mais quoi ! sont-ils éteints, sont-ils partis ? Non, ils ont monté plus haut, et, comme des phares tranquilles et puissants, ils font planer sur nous un rayonnement que nulle puissance humaine ne peut intercepter.

J’avoue que, pour mon compte, je ne partage pas les abattements inconsolables de ceux qui, ayant conçu le progrès sous de certaines formes, le voient tout à coup faire un détour, et, au prix d’apparentes inconséquences, se frayer un autre lit et chercher sa pente à travers des obstacles nouveaux. Que le progrès s’accomplisse par l’abus ou par la privation de la liberté, nous croyons qu’il s’accomplit toujours, et que, désormais, il ne peut plus rencontrer d’entraves durables. Les longues ténèbres des siècles écoulés nous envoient encore des nuages sombres qui s’efforcent d’envahir le ciel, mais la révolution française, résumé terrible et grandiose de tous les efforts antérieurs de l’humanité, a déchiré du haut en bas le voile du temple et jamais plus nous ne verrons reparaître la puissance à long terme des principes du droit divin.

C’est que le sort de ces doctrines est accompli. En s’éclairant de la lumière philosophique, l’homme est arrivé à nier la divinité, ou à concevoir d’elle une notion plus élevée. Athée ou déiste, le xviiie siècle nous