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porte en soi un sentiment religieux doit désirer avec ardeur de voir flétrir le vice et condamner le crime en ce monde ; mais, en même temps, il doit se sentir disposé dans son âme à être l’avocat, devant Dieu et devant les hommes, de tout être égaré qui succombe. Il n’est point de véritable équité sans compassion. Justice, mon Dieu ! contre la puissance du mal ! Pitié pour ceux qui n’ont pas la conscience du mal qu’ils commettent ! Telles doivent être l’aspiration et l’inspiration de l’historien. Que la rigueur des circonstances oblige parfois l’homme d’action à confondre dans le même châtiment et le principe du mal et l’individu qui le représente, ç’a été jusqu’ici la loi des sociétés, loi barbare, il est vrai, mais au-dessus de laquelle il n’a pas été possible apparemment de s’élever, surtout dans les temps de crise. Mais l’historien qui parle à la postérité dispose une seconde fois du sort des hommes absous ou condamnés dans le passé. Notre mémoire est plus durable, plus importante et plus précieuse que notre vie, et, quand il s’agit de la flétrir ou de la réhabiliter, le juge s’élevant au-dessus des lois humaines, au-dessus des nécessités immédiates et même des passions légitimes, doit servir d’avocat à tous les accusés, de confesseur à tous les condamnés.

Ces réflexions nous sont inspirées par la lecture du livre de M. Louis Blanc. Partout nous y sentons le feu de la conviction, l’enthousiasme de la foi, nulle part le mépris de l’humanité, nulle part les haines de l’esprit de parti, nulle part l’insensibilité du fanatisme aveugle. Et on sent aussi à chaque page que ce n’est