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c’est un arrêt, et ce ne sont pas les témoins qu’on prend pour juges dans les décisions qui intéressent l’honneur et la vie des hommes. Les témoins ne rendent pas la justice, ils la servent.

La Révolution a produit tant d’écrits et laissé tant de documents, qu’il faut déjà presque toute la vie d’un homme pour les connaître tous. Et, si cet homme les lisait sans croyance ou sans passion, son discernement ne^lui servirait absolument à rien ; car jamais tant d’émotion n’a soulevé tant d’erreurs, de trouble et de ressentiment dans la conscience des partis. Il faut donc croire à quelque chose d’absolument faux ou d’absolument vrai pour condamner ou pour admirer notre révolution. Hors de là, il n’y a que le doute pour solution à l’examen, et je demande si le doute peut jamais être une solution. C’est pourtant celle qui se présente à notre génération de sceptiques, et cette génération méritera d’être signalée, à son tour, dans l’histoire, comme ayant tenté d’accomplir un prodige, celui de vivre sans savoir pourquoi, et de vivre en paix là-dessus.

Mais cela est à jamais interdit à l’homme, il faut le croire, puisque la pensée qui gouverne officiellement l’époque actuelle et la France en particulier, a épuisé tout son art et fait en ce sens tout le mal possible, sans pouvoir consommer le grand œuvre de notre imbécillité.

Voilà donc qu’en dépit de tout, en dépit des funestes influences qui pèsent sur nous, en dépit de notre propre apathie, en dépit de l’amour de la paix à tout