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père Va-tout-seul ! il faut obéir à la loi et me suivre au dépôt de mendicité. C’est l’ordre de M. le préfet.

LE MENDIANT.

En prison, moi ? on m’avait fait grâce : quel mal ai-je donc fait depuis ?… aurais-tu, malheureux jeune homme, le courage de mener en prison un pauvre vieux comme moi, qui n’a jamais fait de tort à personne ?

LE GENDARME.

Ça ne m’amuse déjà pas tant de vous conduire, mon vieux. Mais, puisque c’est mon devoir, que voulez-vous que j’y fasse ? d’ailleurs, je ne vous mène pas en prison, père Va-tout-seul ; je vous ai dit : au dépôt de mendicité.

LE MENDIANT.

C’est toujours la prison, malheureux ! je te dis, moi, que c’est la prison ! on n’en sort plus quand on veut, on ne se promène plus à toute heure ; on n’est plus à soi-même.

LE GENDARME.

Voyez le grand mal de ne pas courir à la pluie et à tous les vents ! vous ri*avez pas d’abri, on vous en assure un, et vous vous plaignez ? vous êtes encore un drôle de particulier !

LE MENDIANT.

Un abri ? tu dis que je manque d’abri ? mais j’en ai un tous les soirs ; j’en ai mille ! regarde là-bas dans la vallée ! et là-haut sur la colline, et près d’ici à l’entrée du bois, et puis encore plus loin, sur la rivière ! vois le moulin, la ferme, la métairie, le châ-