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XXVI

LA VIERGE À LA CHAISE DE RAPHAËL


La Vierge à la chaise est une de ces grandes pensées qui viennent d’un seul jet aux grands maîtres, parce qu’elles sont simples et nettes. Une belle femme et deux beaux enfants, voilà ce que Raphaël a voulu faire, sans s’inquiéter à l’avance de la majesté du sujet et du prestige du symbole. Il savait que la divinité rayonnerait dans l’expression, et il pensait qu’il n’y avait pas lieu d’idéaliser la forme dans le sens ascétique. On n’était plus au temps du mysticisme austère, on nageait en pleine poésie et en pleine civilisation. On cherchait la vérité, on réhabilitait la nature. Il chercha et trouva tout simplement le type de la vierge de Judée dans une de ces belles créatures qu’on voit encore à Albano, à Laricia, à Gensano. Il fut frappé ou il rêva d’un superbe enfant déjà en possession d’une de ces physionomies hardiment accentuées qui promettent une beauté mâle, et il se dit qu’ils seraient