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Je ne m’intrigue point dans son funeste accueil.
Elle couvre de miel une pilule amère.
Et, sous l’ombre d’un port nous cachant un écueil.
Elle devient marastre aussitôt qu’elle est mère.
 
Je ne recherche point cet illustre avantage
De ceux qui tous les jours sont dans les différends
A disputer l’honneur d’un fameux parentage.
Comme si les humains n’étoient pas tous parens.
Qu’on sçache que je suis d’une tige champestre,
Que mes prédécesseurs menoient leurs brebis paistre,
Que la rusticité fit naistre mes ayeux ;
Mais que j’ay ce bonheur, en ce siècle où nous sommes,
Que, bien que je sois bas au langage des hommes,
Je parle quand je veux le langage des Dieux.

La suite de mes ans est presque terminée ;
Et quand mes premiers ans reprendroient leurs appas,
La course d’un mortel se voit sitost bornée.
Qu’il m’est indifférent d’être ou de n’être pas.
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Tel grand va s’estonnant de voir que je rabote,
A qui je répondrai, pour le désabuser
En son aveuglement, que son âme radote
De posséder des biens dont il ne srait user ;
Qu’un partage inégal des biens de la nature
Ne nous fait pas jouyr d’une mesrae adventure ;
Mais que ma pauvreté peut vaincre son orgueil.
Pour si peu de secours que la fortune m’offre,
Puisque, pour ses trésors en pensant faire un coffre,
Peut-estre que du bois j’en feray un cercueil.

Le destin qui préside aux grandeurs les plus fermes
N’a pas si bien soude sa conduite et ses faits.
Que le tems n’oit prescrit des bornes et des termes
Aux fastes les plus grands que sa faveur a faits.
Ce prince dont l’empire eut le ciel pour limite,
Qui trouvait à ses yeux la terre trop petite