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que la charrue, choisir le temps où la terre est en jachère, et où le blé arraché et foulé, le sillon interrompu, ne peuvent pas laisser de traces révélatrices. Enfin, c’est parfois un rude ouvrage : la pierre est lourde, il faut la transporter et la transplanter plus loin, au risque de ne pouvoir en venir à bout tout seul. Il faut un ou plusieurs complices. On ne s’expose guère à cela pour un ou plusieurs sillons de plus.

Quand l’expertise est faite, quand chacun, ayant donné sa voix, déclare que là doit être le jus primitif, on creuse un peu, et on retrouve le dieu disparu sous l’exhaussement progressif du sol. Le faux dieu est brisé, et la limite est de nouveau signalée et consacrée. Le fraudeur en est quitte pour dire qu’il s’était trompé, qu’une grosse pierre emportée peu à peu par le travail du labourage a causé sa méprise, et qu’il regrette de n’avoir pas été averti plus tôt. Cela laisse bien quelques doutes, mais il n’a pas touché au vrai jus, il n’est pas déshonoré.

En général, le jus sort de terre de quelques centimètres, et, le dimanche des Rameaux, il reçoit l’hommage du buis bénit, comme celui des Romains