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Les bohémiens sont fort gentils : c’est une race aimable et vivace, qui se trouve la même, relativement, à tous les échelons de la société.

La profession est relativement la même aussi : elle consiste à s’isoler des conditions régulières de l’existence générale et à se frayer une route de fantaisie à travers le troupeau du vulgaire. Ce serait tout à fait légitime pour quiconque a le goût des aventures, le courage des privations et l’heureuse philosophie de l’espérance, si, même en s’abstenant du vice qui avilit et de l’intempérance qui hébète, on n’était pas fatalement entraîné, un jour ou l’autre, à oublier toute notion de dignité, et, partant, de charité humaine.

L’homme qui s’endurcit trop vis-à-vis de lui-même s’endurcit peu à peu à l’égard de ses semblables. Il trouve naturel d’exploiter leur travail au profit de son industrie, qui consiste à se faire plaindre jusqu’au jour où il n’y réussit plus du tout et se laisse mourir dans un coin, fatigué de l’ingratitude de sa fonction d’ingrat.

À côté de la figure à la fois souriante et lar-