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pis pour ceux qui manquent. Nous ne craignons pas de recommencer, pas plus que d’apporter de la terre à dos de mulet, à dos d’âne et même à notre dos de chrétien, dans des hottes, pour nous faire un petit jardin dans un trou de rocher. On s’invente tout ce qu’on peut, et, si les courants d’eau emportent l’ouvrage à la mauvaise année, on recommence un peu plus haut, on endigue, on s’arrange et on se sauve.

Ce paysan industrieux et entreprenant est, et je le répète, moins solennel et moins poétique que le nôtre : il ressemble plus à un Auvergnat moderne qu’à un vieux Gaulois. Il manque de cette majesté qu’on peut appeler bovine chez l’homme de la vallée Noire ; mais il est plus intéressant dans son combat avec la terre, et, s’il rêve moins, il comprend davantage.

Encore un trait caractéristique : le paysan de chez nous a peur de l’eau. Il croit que le bain de rivière est malsain, le dimanche, pour qui a sué la semaine. Il croit que la natation est un plaisir d’oisif. Il se noie dans un pied d’eau.