Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/69

Cette page n’a pas encore été corrigée

théâtre seul pouvait m’en donner un tout de suite, si je savais tirer parti de mes dons naturels. Il ne me fallait peut-être que quelques mois pour être convenablement rétribué, et, s’il me fallait quelques années, qu’importe, si Impéria m’aimait et daignait se fiancer à moi ?

Je n’oubliai pas mon père au milieu de mon rêve ; celui de ce cher brave homme était de me voir devenir beau parleur. Il entendait par là devenir avocat ou substitut, la chose n’était pas bien nette dans son esprit ; mais il ne pouvait pas avoir de préjugés contre le théâtre, il ne savait ce que c’était. Je ne crois pas qu’il fût entré une seule fois en sa vie dans une salle de spectacle. J’avais sur lui un ascendant que chaque année augmentait. Je ne pouvais pas désespérer de lui faire comprendre que, quand on est un beau parleur, il vaut quelquefois mieux réciter les belles choses qu’ont écrites les autres que de débiter des sottises qu’on tire de soi.

En songeant ainsi, j’arpentais le quartier environnant, je parcourais la rue Notre-Dame-des-Champs, je longeais le jardin du Luxembourg, la rue de l’Ouest, la rue Va vin, et je revenais vers la