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ne lui déplairait pas. J’oubliai de dîner. J’arrivai sous les galeries de l’Odéon avant que le gaz fût allumé ; j’étais dans un trouble mortel en même temps qu’une joie enivrante me causait des vertiges.

Enfin l’heure sonne, j’entre au foyer ; personne encore qu’une vieille femme accompagnant une grande fille maigre, vêtue à la grecque, qui se regardait avec effroi dans la glace et se disait près de s’évanouir. Je salue, je m’assieds sur une banquette. Je me demande si cette robe et ces bandelettes blanches sont la toilette un peu soignée d’une figurante. Œnone arrive dans sa tunique écarlate recouverte d’un large péplum fauve. Elle s’assied sur un fauteuil, les pieds sur les chenets, et s’écrie :

— Quel fichu temps !

Les vieilles tragédiennes copient souvent les allures sous-lieutenant de l’Empire qu’affectait mademoiselle Georges. La comédie donne de la tenue ; la tragédie, qui entre dans le surhumain, produit par réaction le besoin de rentrer le plus avant possible dans la réalité.

La vieille femme en tartan qui accompagne la jeune Grecque va faire à Œnone une grande révé-