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d’un directeur qui m’avait si généreusement ouvert la porte. Je m’imposais donc une réserve et une politesse d’autant plus faciles que, sentant mon infériorité, je n’aurais pas été bien brillant dans la plaisanterie. Je dois dire aussi que généralement les acteurs étaient gens de savoir-vivre et de belles manières ; sans raideur et sans affectation, ils avaient le ton de la meilleure compagnie, et il est certain que je m’instruisais encore plus en les écoutant causer dans l’entr’acte qu’en les voyant travailler. Deux ou trois avaient pourtant le droit de tout dire, mais ils n’en abusaient pas tout haut devant les femmes ; toutes savaient se faire respecter au théâtre, quelles que fussent leurs mœurs privées à la ville.

Je prenais donc là des leçons de tenue et cette simplicité d’allures qui est le cachet de la bonne éducation. Toutes ces personnes avaient appris par principes la meilleure manière d’être qu’on puisse porter dans le monde, et ils eussent paru, dans le plus grand monde, tout aussi grands seigneurs que sur la scène. Ils avaient pris l’habitude d’être ainsi, il n’y avait plus de différence, même quand ils s’égayaient, entre les personnages qu’ils venaient