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et l’écrase. Tu l’aimeras passionnément, follement, avec les orages de la jeunesse et les fautes de l’inexpérience. Toujours généreuse de parti pris, elle t’écrasera de sa douceur, de son oubli, de son dédain peut-être ! Non, cent fois non ; arrache-la de ton imagination, et, si la séduction de son initiative est entrée dans ton cœur, broie ton cœur plutôt que de l’avilir.

Je me tins parole, je n’écrivis plus. Je me replongeai en désespéré dans le travail. Je m’abstins de tout plaisir, je m’interdis le spectacle, on ne me revit ni sur les banquettes ni dans les coulisses de l’Odéon. J’acquis, non pas beaucoup de connaissances, mais beaucoup de notions, et je reconnus avec un plaisir mêlé de terreur que j’apprenais tout facilement, que j’étais propre à tout, c’est-à-dire peut-être propre à rien. L’hiver s’écoula ainsi. Je ne pensais plus à Impéria, je me croyais guéri d’elle. Aux approches du printemps, je sentis du trouble dans ma tête fatiguée, des vertiges et le dégoût des aliments. Je n’y voulus pas faire attention. Au mois d’avril, les petits accidents s’étant répétés, je fis une grande course au soleil dans les environs de Paris, croyant me rafraîchir le sang