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me semble qu’avec Bellamare pour directeur on ne peut pas être absolument malheureux, et tout m’amuse ou m’intéresse dans le sort qu’il nous fait.

— Je pense en tout comme vous. Alors, si, manquant à jamais de talent et de succès, je m’attache quand même à cette vie insouciante et douce, vous ne me prendrez pas pour un de ces malheureux fous qui s’acharnent à une illusion ridicule ? Vous ne me mépriserez pas ?

— Non certes, car je suis dans la même situation que vous. Je poursuis l’essai d’une carrière où je ne suis nullement sûre de réussir, et je sens que j’y persisterai d’une façon ou de l’autre, même si je n’arrive pas à avoir un véritable talent. Que voulez-vous ! c’est comme cela ; quand on a pris goût au théâtre, tout le reste ennuie.

— Pourtant, ce n’est pas votre milieu naturel et final ? Vous pouvez rencontrer, d’un jour à l’autre, l’occasion de faire ce qu’on appelle un beau mariage ?

— Je ne veux pas faire un beau mariage !

— Vous n’en voudriez pourtant pas faire un qui vous jetterait dans la misère ?