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— Allons, venez, mon amie, lui-dit-il. Vous allez être encore une fois la reine du bal.

Le bal était somptueux ; mais, par un de ces hasards facétieux qui se rencontrent souvent dans le monde, il y avait une quantité exorbitante de femmes laides et vieilles. Parmi les jeunes et les agréables, il y en avait peu de vraiment jolies. Lady Mowbray eut donc un très-grand succès, et Olivier, qui ne s’attendait pas à la rencontrer, s’abandonna à sa naïve admiration. Dès que le comte le vit auprès de lady Mowbray, il s’éloigna, et, dès qu’il les vit s’éloigner l’un de l’autre, il prit le bras d’Olivier, et, sous le premier prétexte venu, il le ramena auprès de Metella.

— Vous m’avez dit en route que vous aviez vu Gœthe, dit-il au voyageur ; parlez donc de lui à milady. Elle est si avide d’entendre parler du vieux Faust, qu’elle voulait m’envoyer à Weimar tout exprès pour lui rapporter les dimensions exactes de son front. Heureusement pour moi, le grand homme est mort au moment où j’allais me mettre en route.

Buondelmonte tourna sur ses talons fort habilement en achevant sa phrase, et laissa Olivier parler de Gœthe à lady Mowbray.

Metella, qui l’avait d’abord accueilli avec une politesse bienveillante, l’écouta peu à peu avec intérêt. Olivier n’avait pas infiniment d’esprit, mais il avait beaucoup de bonnes lectures ; il avait de la vivacité, de l’enthousiasme, et, ce qui est extrêmement rare chez les jeunes gens, pas la moindre affectation. Avec lui, on n’était pas forcé de pressentir le grand homme en herbe, la puissance intellectuelle méconnue et comprimée ; c’était un vrai Suisse pour la franchise et le bon sens, une sorte d’Allemand pour la sensibilité et la confiance ; il o*avait rien de français, ce qui plut infiniment à Metella.