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et mon jardin, et j’allai prendre un billet de galerie à la porte extérieure du théâtre.

Ce théâtre était l’ancien réfectoire des Carmes, dont la maison de ville avait été le couvent. La façade, modernisée et badigeonnée, ne laissait plus soupçonner l’ancien édifice ; mais, dans l’intérieur, de précieux vestiges étaient restés intacts. La porte de la salle de spectacle était une ogive finement historiée, et, dans la salle même, quelques restes d’arceaux en relief et des figures symboliques étaient mal dissimulés sous la décoration des loges et des galeries.

Cette salle était sombre et mal disposée pour les spectateurs ; mais sa coupe avait du style, et ses voûtes élevées prêtaient à la sonorité. Je ne fus donc pas étonné d’y entendre chanter l’opéra-comique. Ce favorable local devait être connu des troupes nomades qui, en se rendant d’une grande ville à une autre, cherchaient, en donnant quelques représentations dans les petits endroits, à payer au moins leurs frais de voyage. Il y avait assez de monde, des bourgeoises en grande toilette aux premières places, un parterre d’ouvriers en blouse et en casquette ; des dames de la seconde et de la troisième société à l’amphithéâtre et aux galeries : jeunes femmes et demoiselles aussi élégantes que celles de la vieille bourgeoisie, mais accompagnées de mères et de tantes en petits bonnets plissés comme ceux des artisanes. Dans cette classe, on