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VIII


Un soir d’hiver que nous étions réunis au salon autour d’un bon feu, on vint me dire tout bas qu’un voyageur, qui ne voulait pas dire son nom, demandait à me parler. J’allai le trouver dans mon cabinet.

Je vis un grand jeune homme pâle, étoffé dans un vêtement cossu, les cheveux courts plaqués aux tempes, l’air digne et cérémonieux. Il parla, et je reconnus Albany, l’ex-débraillé, métamorphosé en homme riche ou rangé.

Il entra en matière sans embarras, bien qu’il m’avertît qu’il avait une communication très-délicate à me faire.

— Je sais, monsieur, dit-il, par mademoiselle d’Estorade, que vous êtes son ami le plus sérieux et le plus dévoué. Ses lettres m’ont mis à même de connaître la confiance qu’elle a en vous, et, sans bien comprendre comment elle a été amenée à vous parler de moi, je sais que je ne vous apprends rien de nouveau en vous disant que de longues et anciennes relations d’estime et d’amitié réciproques existent entre nous.