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ous voulez causer, nous causerons ; je m’arrange de tout. Rien ne me gêne ni ne me contrarie pourvu que mon cher fils soit content. Je l’ai laissé exprès un peu seul avec Louise. Quand ils sont ensemble, il plaide mieux et elle se laisse charmer, il parle si bien !

— Je le sais, répondis-je. Tout ce qu’il dit, tout ce qu’il pense est beau et bien ! Mais croyez-vous vraiment travailler à son bonheur ?…

— Ah ! je sais bien ! je sais bien ! reprit-elle avec plus de vivacité que ne le lui permettait d’habitude son parler lent et mesuré. Elle a bien des préjugés, de gros préjugés, et avec cela certains petits défauts. Mais on change tant quand on aime ! N’est- ce pas votre avis ?

— Moi, je ne sais pas, répondis-je ; je n’ai pas eu à changer d’idée.

— Mon fils me l’a dit. Vous avez toujours aimé le jeune Franqueville. Il n’est pas comme sa sœur, lui ! Il n’a pas d’orgueil. Peut-être l’engagera-t-il à_ _épouser mon fils ; qu’en pensez-vous ?

— Je le pense.

— A-t-il beaucoup d’autorité sur elle ?

— Aucune.

— Et vous ?

— Encore moins.

— Tant pis, tant pis ! dit-elle d’un ton mélancolique en prenant son tricot.

Et elle ajouta en passant ses aiguilles dans ses cheveux gris bouclés sous un grand bonnet de dentelles, qui ressemblait pour la forme à ma cornette de basin plissé :

— Vous avez peut-être des préventions contre elle. Elle vous a fâchée tout à l’heure ?