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— Puisqu’il va si bien, dis-je à Dumont, pourquoi ne vient-il pas me voir ?

— Le médecin a défendu qu’on vous fît parler, ayez patience deux ou trois jours encore. Vous devez cela à vos amis qui ont été si inquiets de vous.

Je me soumis ; mais, le lendemain, sentant que je pouvais faire le tour de la chambre sans fatigue, je m’approchai de ma fenêtre et je regardai celle du prieur ; elle était fermée, ce qui était tout à fait contraire aux habitudes d’un asthmatique qui permettait à peine qu’elle fût fermée la nuit par les grands froids.

— Dumont, m’écriai-je, vous me trompez !… Le prieur…

— Voilà que vous vous tourmentez, répondit-il, et que vous risquez de retomber malade ! Ce n’est pas bien, vous avez_ _promis de patienter.

Je me rassis et je cachai mon angoisse ; Dumont, pour me faire croire qu’il allait chez le prieur, me laissa avec la Mariotte que je ne voulus pas questionner. Comme c’était l’heure de me faire manger, elle me quitta pour aller faire ma soupe. Alors, me trouvant seule et ne pouvant supporter plus longtemps mon incertitude, je sortis doucement de ma chambre, et, en me soutenant contre les murs, je gagnai celle du prieur qui était au bout du petit cloître. Elle était ouverte ; le lit sans rideaux, les matelas retournés et repliés en deux, la chambre bien nettoyée, bien rangée, le grand fauteuil de cuir tourné contre la muraille, les vêtements serrés dans les armoires, un reste d’odeur d’encens mortuaire, tout me révélait la triste vérité. Je me rappelai que, de la chambre voisine qui