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fait sans force, sans connaissance et sans souvenir ni souci d’aucune chose. Je n’éprouvais qu’un besoin, dormir, dormir encore, dormir toujours. Ma seule souffrance, c’était quand on m’examinait et quand on m’interrogeait. C’était pour moi un dérangement cruel, un effort impossible à faire. Je restai ainsi sept jours entiers. J’avais pris une fluxion de poitrine. Ce fut ma seule maladie, mais elle fut très grave et on espérait peu de moi quand je repris ma connaissance tout d’un coup, comme je l’avais perdue, sans avoir conscience de rien.

J’eus de la peine à rassembler mes souvenirs. J’avais rêvé dans la fièvre que le prieur était mort. Je l’avais vu enterrer ; — et puis c’était Émilien, et puis moi-même. Enfin je réussis à questionner Dumont que je reconnus auprès de mon lit :

— Vous êtes sauvée, me dit-il.

— Et les autres ?

— Tous les autres vont bien.

— Émilien ?

— Bonnes nouvelles. La paix est faite là-bas.

— Le prieur ?

— Mieux, mieux ! beaucoup mieux !

— Mariotte ?

— Elle est là.

— Ah oui ! mais qui donc soigne… ?

— Le prieur ? Il est bien_. _J’y retourne. Dormez, ne vous inquiétez de rien.

Je me rendormis et j’entrai tout de suite en convalescence. La maladie n’avait pas duré assez longtemps pour m’affaiblir beaucoup. Je fus bientôt en état de me tenir sur un fauteuil et j’aurais voulu aller voir le prieur, mais on m’en empêcha.