fortune, ils la gardent pour le fils aîné. Ma sœur et moi, nous n’aurons qu’une part une fois faite, pour entrer chacun dans un couvent.
— Quel âge est-ce qu’elle a, votre sœur ?
— Onze ans : et toi ?
— Je n’ai pas encore treize ans faits.
— Alors, tu es grande, ma sœur est plus petite que toi de toute la tête.
— Sans doute que vous l’aimez, votre petite sœur ?
— Je n’aimais qu’elle.
— Ah bah ! et vos père et mère ?
— Je ne les connais presque pas.
— Et votre frère ?
— Je le connais encore moins.
— Comment ça se fait-il ?
— Nos parents nous ont fait élever à la campagne, ma sœur et moi, et ils n’y viennent pas souvent, ils vivent avec le fils aîné à Paris. Mais tu n’as jamais entendu parler de Paris, puisque tu ne connais pas seulement Franqueville.
— Paris où il y a le roi ?
— Justement.
— Et vos parents demeurent chez le roi !
— Oui, ils servent dans sa maison.
— Ils sont les domestiques du roi ?
— Ils sont officiers ; mais tu ne comprends rien à tout cela et cela ne peut t’intéresser. Parle de ton mouton. Est-ce qu’il t’obéit quand tu l’appelles ?
— Pas trop, quand il est affamé comme aujourd’hui.
— Alors, quand je voudrai te le ramener, il ne m’obéira pas ?