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femme le lui persuade, elle est certaine de le dominer toujours.

Cependant elle n’abuse point de son empire, et sait rendre heureux un caractère hardi, entreprenant et faible dont elle connaît toutes les qualités et toutes les défaillances. Moins heureuse que ses sœurs, elle n’a pas d’enfant. Cette stérilité l’afflige et l’humilie au fond du cœur ; mais elle sait se la faire pardonner par l’humilité austère avec laquelle elle sait dire à son mari :

— Dieu n’a pas béni mes entrailles. Je ne le méritais pas. En me donnant votre amour, il fallait bien un châtiment pour mon passé. Autrement, à force d’être miséricordieux, le ciel aurait cessé d’être juste !

Amédée chérit sa femme. Il trouve qu’elle ressemble à Olympe, mais parfois il pense qu’elle est plus belle encore.

Dutertre a repris ses forces ; mais, au lieu d’avoir, comme à quarante ans, l’air d’un homme de trente, il a l’air d’en avoir dix de plus que son âge. Il est le chef adoré d’une famille superbe. Son front, resté pur de rides, est le siége d’une sérénité divine ; mais son regard est celui d’un martyr qui subit la torture de la vie. Chaque jour, il va regarder en silence la tombe de sa femme ; mais Benjamine, qui l’épie, a soin qu’il y trouve un de ses beaux enfants couché dans les fleurs, ou elle-même agenouillée sous les saules.


FIN.



F. AUREAU. — IMPRIMERIE DE LAGNY