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— Je n’en sais rien, répondit Blondeau, qui remarqua le trouble de Dutertre avec une grande surprise.

— Elle a été à Mont-Revêche, dit Nathalie, qui était rentrée à pas de loup et qui fit semblant de venir chercher sa broderie sur la table.

Dutertre reçut ce coup avec impassibilité, comme s’il s’y fût attendu.

— Ah ! dit-il, est-ce que la pauvre vieille Manette serait malade ? Ma femme a beaucoup de bontés pour elle : c’est une honnête créature.

— Je crois que mademoiselle Nathalie se trompe, dit Blondeau, qui, sans comprendre, voyait un drame domestique se dérouler sous ses yeux. Il connaissait Nathalie, il était pénétrant. Il sentait sa propre intervention nécessaire, sans trop savoir encore sur quel point elle devait porter. — Je ne pense pas que madame Dutertre ait eu occasion d’aller ces jours-ci à Mont-Revêche, ajouta-t-il en voyant que son doute soulageait Dutertre.

— Moi, je sais qu’elle y a été, reprit l’impitoyable Nathalie. Quel mal y aurait-il ? Probablement, il y avait des malades. Si ce n’est pas la vieille Manette, ce pouvait être le vieux Gervais.

— Comment le sauriez-vous donc ? dit Dutertre perdant ses forces. Est-ce que vous auriez des espions dans la campagne ?

Et il essaya un sourire d’enjouement qui fut plein d’amertume.

— Eh ! mon Dieu ! la campagne est semée d’espions tout aussi peu curieux, tout aussi peu médisants que moi, dit Nathalie d’un ton léger. Un de vos nouveaux fermier de Mont-Revêche, puisque la ferme vous appartient à présent, mon père, est venu tantôt pour nous offrir un cadeau de gibier, que j’ai dû recevoir, ma belle-mère étant