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— À demain, répondit Thierray. Attends seulement trois minutes, et tu emporteras le billet que je vais écrire pour le jeter dans la première boîte qui se trouvera sur ton chemin.

Et Thierray se mit à écrire en prononçant tout haut :

« Monsieur,

» Je ne puis avoir l’honneur de vous accompagner demain. Il faut que je me prive du plaisir de faire avec vous le voyage. Un de mes amis m’emmène de son côté ; mais nous serons rendus au but les premiers. Cet ami est votre voisin, le comte Flavien de Saulges, qui se propose de vous voir pour des intérêts communs.

» Agréez, monsieur, etc., etc.

» D J. Thierray. »

— À qui me présentes-tu ainsi ? dit Flavien avec nonchalance.

Thierray mit l’adresse et lui présenta la lettre.

À monsieur Dutertre, membre de la Chambre des députés, dit Flavien en riant. Le mari ! mon acquéreur ! l’homme de tantôt, par conséquent ?

— Lui-même. Et qu’on dise que le hasard est aveugle ! Il était écrit deux fois au livre du destin que je partirais demain pour le Nivernais, et que j’irais soupirer pour madame Dutertre. Or, j’aime beaucoup mieux faire la route avec toi qu’avec le mari ; rien ne me gêne comme un mari sans méfiance. Celui-là part à sept heures du soir, nous partons à sept heures du matin. Nous serons censés avoir eu des raisons pour ne pas l’attendre douze heures, ce qui eût été plus poli, j’en conviens, mais infiniment moins agréable.

— Il nous eût beaucoup gênés, dit tranquillement Fla-