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s’était un peu éloignée vers le fond de l’appartement et ne recevait plus autant de lumière.

— Cela tend à se dissiper, pensa Thierray. Voyons, allons vers le spectre !

Il essaya ; mais ses jambes lui refusèrent le service. Autant son cerveau était libre et fort, autant son corps était engourdi et glacé.

— Je ne voudrais pas m’évanouir, pensa encore Thierray, je ne me rendrais plus compte de rien. Voyons, puisque j’ai au moins la parole libre, évoquons ma propre fantaisie par ma propre volonté. Approchez-vous, cria-t-il au fantôme, je vous l’ordonne, et ôtez votre masque, je veux vous voir.

Le spectre fit un signe négatif.

Soit que l’effort de la volonté eût grandi son courage d’une manière peu commune, soit que le geste du fantôme eût pris une apparence de réalité surprenante, Thierray sentit ses pieds se déclouer du marbre du foyer, et il marcha droit au fond du salon, en disant d’un ton presque enjoué :

— Eh bien, je vous l’arracherai, votre masque !

Le spectre recula et fit légèrement le tour du salon poursuivi par Thierray, dont les jambes n’étaient pas parfaitement libres, mais dont la volonté augmentait, en voyant l’apparition tendre à lui échapper. Ce mouvement éveilla le perroquet, qui s’écria d’une voix plus distincte et plus sinistre que de coutume :

Mes bons amis, je vais mourir !

Un cri d’effroi partit du gosier de madame Hélyette, et elle tomba comme défaillante sur un fauteuil.

Thierray, convaincu alors qu’il était mystifié par une personne bien vivante, s’élança vers elle et la saisit par le bras. Il ne croyait plus avoir affaire à un fantôme pro-