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— À coup sûr, pensa Thierray, qui s’empara de cette pièce de conviction sans la signaler à l’attention de Manette, c’est une main lourde et maladroite qui a brisé la base du bouquet. C’est un esprit obtus qui a fait tremper dans l’eau le parchemin que voici, et où il est impossible de rien distinguer. Cela me fait bien l’effet d’être l’esprit et la main de M. Crésus. Il nous accompagnait pour la dernière fois, ce soir-là. Il a pu entrer ici pendant que nous montions au donjon pour chercher le portrait de madame Hélyette. Je le saurai !

Il examina vainement la bandelette mystérieuse. Il y avait eu quelque chose d’écrit ; car on distinguait encore le haut d’une majuscule qui pouvait aussi bien être le fragment d’un O que celui de toute autre initiale. Impossible de s’assurer du fait.

Alors Thierray alla se rasseoir devant sa table de travail dans le salon de la chanoinesse. Il avait pris ce lieu en amitié, même avec l’unique et triste société du perroquet, qui, au dire de Manette, ne pouvait se souffrir ailleurs que là où il avait ses habitudes. Mais Thierray essaya en vain de reprendre le fil de sa composition. Il était trop préoccupé de l’aventure de Flavien et de tout ce qui se rattachait dans cette aventure au souvenir de Puy-Verdon. Alors il se posa le problème que ni lui, ni Flavien, ni bien d’autres n’eussent pu résoudre :

— Qu’est-ce donc qu’Olympe Dutertre ? un fée, une folle, un ange, une coquette ou une bête ? Flavien ne perd pas son temps à se demander tout cela, pensa-t-il, et le seul problème qu’il ait cherché à résoudre en fouettant le cheval auquel il a donné ce beau nom, ç’a été de savoir s’il était aimé ou s’il ne l’était pas. Heureuse et riche nature, encore une fois ! Il ne voit dans une femme que ce qui lui plaît instinctivement : la douceur et la